Entreprendre en Côte d’Ivoire : une histoire qui se décline au féminin et se conjugue au présent. En réalité, l’entrepreneuriat féminin est un sujet à la fois ancien et actuel.

Ancien, car par nature quasiment toutes les femmes africaines entreprennent. Il suffit d’aller dans les campagnes pour voir que ce sont elles qui font marcher l’économie, de façon parfois précaire et non reconnue mais ô combien essentielle.

Actuel, parce que justement on prend de plus en plus conscience du rôle que jouent les femmes et qu’il y a un réel besoin à mieux structurer les choses et à mieux les accompagner. Les femmes sont vues comme de véritables piliers du développement des pays africains, de par leur esprit entrepreneurial et également car elles ont, actuellement, une plus grande proportion à prendre en compte les problématiques sociétales.

Un écosystème en devenir : rassembler pour triompher

Le paysage de l’entrepreneuriat féminin se dessine en Côte d’Ivoire et se dote de contours de plus en plus nets.

De nombreuses structures et projets se lancent pour soutenir l’entrepreneuriat des femmes en Afrique. Dans le cadre de mon séjour en Côte d’Ivoire, j’ai eu l’occasion de travailler avec deux d’entre-elles plus spécifiquement et de découvrir de nombreux projets très pertinents.

Le leadership au coeur du processus

Empow'HerDonner aux femmes les outils pour être plus efficaces et pour oser se lancer, tel est l’objectif des initiatives que j’ai voulu soutenir.

J’ai réalisé des entrevues guidées d’entrepreneures pour Empow’Her, qui s’engage pour les droits et l’émancipation des femmes dans le monde.Empow’Her Côte d’Ivoire, première filiale d’Empow’Her vient d’être créée et a pour objectif d’ouvrir en 2017 un hub dédié aux femmes entrepreneures. Ce hub proposera de la formation, du coaching, de l’incubation de projet et de la mise en réseau de femmes. C’était une très belle opportunité pour moi de rencontrer des femmes inspirantes, d’appréhender les réalités africaines et de nourrir mes réflexions sur le sujet. 

J’ai également eu l’honneur d’animer un webinaire sur l’entrepreneuriat féminin en Afrique pour RSE et PED très engagé dans la responsabilité sociale des entreprises dans les pays en développement. Intitulé « Leadership et Entrepreneuriat Féminins : enjeux et représentations socio-culturelles », ce premier webinaire inaugurait le projet de E-formation pour le leadership féminin dans l’économie africaine avec la présence de Fatime Christiane N’Diaye (Spécialiste Technique Principale Genre pour l’Afrique Francophone, basée à Dakar) et Colette Jeannine Minka (Fondatrice et dirigeante d’Emploi Services au Cameroun).

Accompagner, Former, Inspirer

She Is The CodeVoici les trois mots-clés qui n’ont cessé de revenir au fil de mes échanges : Accompagner, Former, Inspirer.

Les femmes ont besoin d’être suivies, d’être mises en réseau, d’échanger. Elles ont besoin d’être formées et d’avoir des rôles modèle.

La formation agit comme levier dans la lutte contre l’exclusion et agit pour la réinsertion des femmes. Certains tentent de combattre les stéréotypes comme la formation She Is The Code, fondée par Jean-Patrick Ehouman qui forme les femmes au métier du numérique ou encore de la Smart African Women Leaders Platform qui dispense des formations dans le webmarketing à des femmes handicapées. La première session aura lieu en juillet 2017.

Le magazine Ayana Webzine, bien plus qu’un simple magazine de lifestyle au féminin, promeut les femmes africaines et met en lumière des modèles. Et des modèles, il y en a de toutes sortes pour que chaque femme puisse se reconnaitre et se sentir inspirée. Le magazine lance d’ailleurs chaque année l’initiative Super Woman pour le 8 mars, journée internationale des droits des femmes.

Des rôles modèle et non des top models : ouvrir la voie

Par l’intermédiaire d’Empow’Her, j’ai eu la chance de rencontrer trois femmes exceptionnelles, très différentes mais avec cette même envie et cette même passion de se battre pour leurs rêves.

Mandy Dagry, fondatrice de Bati’Décor, évolue dans un univers très masculin, et a à coeur de partager son expérience et d’aider les femmes à devenir leader.

Amie Kouamé, co-fondatrice du magazine Ayana Webzine, est également très engagée dans le combat de l’égalité hommes/femmes

Sabine Nomvia, fondatrice de Bee’s, une marque de bijoux et d’accessoires, utilise le pagne dans ses créations et promeut la culture africaine de façon créative.

Mandy DAGRY
Mandy DAGRY
Amie Kouamé
Amie KOUAME
Sabine Nomvia
Sabine NOMVIA

 

Les principaux freins

Si elles ont pu être confrontées à des problématiques différentes car elles n’évoluent pas dans les mêmes secteurs, il est intéressant de noter que toutes les trois ont rencontré des problématiques similaires comme des freins financiers ou le manque de formation et d’accompagnement. Mais l’une des choses qui est ressortie est la difficulté d’entreprendre quand on est femme car culturellement ce n’est pas toujours bien accepté.

Tandis qu’Amie m’explique que « La femme africaine doit être pudique, discrète. L’effacement est très prisé. Une femme qu’on ne voit pas, qui ne parle pas, c’est une grande femme. » ;  Sabine met l’accent sur le manque de soutien : « Aujourd’hui, c’est encore très difficile pour les femmes car tu n’as pas toujours le support, le soutien moral des personnes qui t’entourent. »

Les clés de la réussite

Toutes les trois le disent, la clé du succès c’est la volonté, la persistance. Il faut s’organiser, il faut s’auto-former, il faut s’acharner et y croire.

Un autre point important est de savoir bien s’entourer, à la fois en trouvant des gens de confiance mais aussi en développant un management propice.

Mandy insiste sur l’importance d’impliquer ses employés : « J’ai mis en place une politique très particulière, ils sont eux-mêmes impliqués et engagés, c’est leur bébé à eux aussi. Ce n’est que comme cela que cela peut fonctionner. »

Pour Amie c’est également très important et elle me confie d’ailleurs : « Ma plus grande fierté c’est l’équipe, m’entourer de gens qui aiment ce qu’ils font. Chacun à sa manière veut apporter sa pierre à l’édifice. Je suis fière d’eux, je suis fière de ce qu’ils font et de ce qu’ils essaient de faire. Mes équipes ne travaillent pas pour Ayana parce qu’elles en ont besoin mais parce qu’elles aiment ça. »

C’est important d’embarquer les gens dans son rêve, de susciter l’intérêt et toutes les trois ont réussi à le faire. Bien plus qu’une entreprise, leur projet respectif véhicule des valeurs, des énergies positives auxquelles les gens ont envie de se rattacher et de prendre part.

Et pour finir sur une note positive je voudrais partager leur message d’espoir.

Mandy Dagry

Avec toutes les épreuves rencontrées et surmontées, je peux dire avec fierté que la décision d’Entreprendre, fait partie des meilleures décisions de ma vie.

Amie Kouamé

Toujours essayer ! 100% des gens qui ont essayé ont réussi. Apprendre, se former. Aujourd’hui avec le digital, il y a plein de possibilités. Parler à d’autres femmes, s’enrichir de leur expérience.

Sabine Nomvia

Il n’y a jamais de bon moment pour se lancer, il faut déjà se lancer. Il ne faut pas se laisser vaincre par tous les obstacles mentaux ou les obstacles réels.